dimanche 16 mars 2014

TEXTE DE RAINER MARIA RILKE

Il est étrange, sans doute, de ne plus habiter la terre ;
De ne plus suivre ses coutumes, qu’on vient d’apprendre à peine ;
Et de ne donner plus aux roses, à d’autres choses en promesse, la signification du devenir humain ; de n’être plus ce qu’on avait été dans l’angoisse infinie des mains, et puis d’abandonner jusqu’à son propre nom, tel un jouet brisé.
Étrange, de ne désirer plus les désirs. Étrange, de voir tout ce que des rapports tenaient liés ensemble, flottant si librement dans l’espace.
Être mort est un état pénible et plein de recommencements, jusqu’à ce qu’on parvienne et qu’on pénètre un peu l’éternité. Mais les vivants, tous commettent la faute de faire trop grande leur différences.
Les Anges (dit-on) souvent ne savent pas s’ils passent parmi des vivants ou des morts.
Le courant de l’éternité à travers les deux règnes entraîne tous les âges avec soi, toujours, et les confond chacun.



Ils n’ont donc plus besoin de nous, enfin, ceux qu’enleva la mort précoce ; doucement du terrestre on se déshabitue, ainsi que doucement on passe l’âge ou l’on a besoin du sein de la mère.
                                                                                                      Rainer Maria Rilke


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