dimanche 9 mars 2014

ÉCRIRE LE POÈME. de Petr Kràl



De Petr Kràl.

Écrire le poème.


Le POÈME, curieusement, s’écrit en grande partie tout seul ; il s’impose lui-même à son auteur et fait de lui l’instrument grâce auquel il prend corps. Je ne me compte plus parmi les surréalistes, mais je partage toujours deux de leurs convictions. D’abord le « vrai » poème naît d’une illumination, d’un instant d’inspiration et de vertige. Ensuite, ce qui fait le prix du poème est aussi qu’il puisse « fonctionner » dans la vie et nous indiquer – ou éclairer – les chemins d’une expérience réelle. Plus que des « mallarméens », sur ce plan, je me sens proche des «  rimbaldiens » de ceux pour qui les mots importent moins que les choses elles-mêmes. Comme pour Yves BONNEFOY, le poème n’est pas à mes yeux une gemme verbale mais une sonde susceptible de nous orienter ; il ne forme pas seulement un objet autonome, il complète aussi le réel qui nous entoure et reste en ce sens inachevé, pour ne devenir « signifiant » qu’en liaison avec les faits auxquels il renvoie. Bien « qu’absente de tous bouquets », la fleur du poème nous incite également à la chercher parmi les fleurs matérielles ; elle exige même que nous payions son écarlate avec du vrai sang.

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