Extrait :
– Parmi les photographies de Serge Assier à Venise j’ai cru entendre le
sifflement du serpent lorsque les dieux nous créèrent immortels.
– Je ne crois ni aux dieux ni à l’immortalité... vous êtes trop idéaliste. J’aime les photos d’Assier... un point, c’est tout !
– Votre Vulgate matérialiste vous empêche de voir que nous avons perdu
cette pérennité terrestre à cause d’un détail absurde ou d’une erreur
insignifiante. Comme la pomme d’Eve au Paradis ou la soif de Gilgamesh
en Assyrie... Regardez la Venise de Serge Assier.
– Les aventures héroïques, le combat contre des monstres ou des taureaux
célestes... quel rapport avec la précision du photographe ?
– Gilgamesh, prostré, pleura de longs mois la mort de son ami Enkidou.
Aventures, combats et douleurs semblables à ceux que vit le photographe
cloîtré dans son laboratoire...
– ...‘cloîtré’, comme vous dites, met un terme au troisième acte de la
photo sans d’autres pleurs que ceux provoqués par l’acide.
– Il s’interroge dans sa solitude : « au delà de la photographie, la
photographie absolue existe-t-elle » ? Et il s’agrippe au cou de la
girafe et s’envole avec elle, les pieds tenaillant ses flancs pour ne
pas perdre l’équilibre.
– Vous, je vous prie d’avoir les pieds sur terre : Serge Assier n’a ni
racines, ni ailes, mais des bras et des jambes pour photographier ou
pour travailler dans son atelier.
[…]
Fernando Arrabal, extrait de Assyrie et Venise, in ' ' ' Le Cahier du Refuge ' ' ' 218, décembre 2012
Vidarrabal :
Comme toute forme de vie Vidarrabal est né d’une rencontre. Un soir à Paris j’assiste à une adaptation de La pierre de la folie
chez Fernando Arrabal. Texte torturé, reflétant à certains égards le
poids de l’histoire sur son sujet, une plume à la fois encrée dans le
sang et les traces d’un tricycles envolé dans les cieux, autant
d’éléments qui m’ont conduit à pousser mon regard vers cet homme dont
j’ai pu croiser le sourire sous le menton de mon père.
Le film est une forme de biographie menée
avec l’artiste dont le drame personnel qu’est la disparition de son père
durant la guerre civile Espagnole n’a pu tarir la formidable animosité
présente en son oeuvre. Enfant de la guerre, exilé volontaire puis
forcé, il n’eut cesse de se battre contre toute forme d’autoritarisme
qui font de son univers un champs d’expérimentations ludiques aux
teintes empruntes de surréalisme. André Breton, Tristan Tzara, puis
Topor et Jodorowski avec qui il créait Panique ; c’est aussi
ces rencontres là Arrabal ; une plume entre les branches de l’Arbre du
bien et du mal. Un voyage au delà des cultures, des frontières ou le paysage
de Fernando Arrabal se dessine comme une île entre les étoiles. Dans
l’obscurité, Fréderic Arrieta Arranzueque, spécialiste de l’oeuvre, nous
accompagne de ses feux dans la compréhension de cet homme de génie dont
l’univers oscille entre la feuille, la scène et le cinéma.
Xavier Pasturel Barron, à propos de son film Vidarrabal, in ' ' ' Le Cahier du Refuge ' ' ' 218, décembre 2012
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