lundi 19 août 2013

MÉMOIRES INDIENNES



MÉMOIRES INDIENNES





Les plages indiennes, le voyageur solitaire fait souvent d’étranges rencontres.
Des routes poussiéreuses traversent les ruines des palais, des temples, les plages battues par les flots. Le voyageur qui porte sac sur le dos fait parfois d’étranges rencontres au détour d’une roche bouleversée. Les fossés tout autour d’une massive construction cachent les petits animaux parfois venimeux. Les chiens décharnés errent dans l’espace désertique de la plage, les chèvres extatiques couvertes de mouches se nourrissent de vieux papiers, de bois sec, d’immondices dispersées.
Parfois, un enfant venu de nulle part, qu’on dirait accouché par la plage surgit. Le sable s’ouvre et l’enfant paraît, étrange bébé déjà chevelu, crasseux des pieds et des mains, les genoux usés et les yeux pleins de vie, de braise fleurant le santal, de sourire, bouche éclatée sur les dents rouges du bétel patiemment mastiqué.
Nous avons rencontré cet enfant sur une plage déserte, un jour de vent chaud et de mer effrayante, les rouleaux écumants tiraient nos corps vers le large  et le soleil brûlait notre épiderme imprudemment découvert.
L’enfant nous regardait, puis son regard se perdait sur la mer, fixait un oiseau de proie au bec effilé, vautour planant très haut, cherchant sa proie, prêt à s’abattre.
Il bougeait lentement sur le sable, lave cristalline brûlante au creux de la main.
Une de ses jambes traînait, paralysée, sans muscles et sans réflexes.

Alors il tendit le bras vers la chevelure mordorée de celle qui avait choisi de franchir avec moi cette distance
Entre les pays en guerre, les pays muselés dans leurs pensées et leurs écrits.
Il avait les doigts très fins, entraînées à nouer la laine des tapis, à fouiller dans l’ordure et la fiente.
Je crus voir les plumes terminant l’aile d’un ange.
Sous le vent de la mer la penne se courbait et pénétrait la masse brune parcourue de reflets auburn.


©christiancazals






L'ENFANT



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