Thiaroye
Le 1er décembre 1944, de retour de la guerre en Europe, des dizaines de soldats africains, 35 selon les autorités militaires beaucoup plus selon d’autres sources, sont exécutés sur ordre de l’administration française au camp militaire de Thiaroye à proximité de Dakar où ils étaient réunis avant de rejoindre leurs pays d’origine. Le seul tort de ces homes : réclamer leurs dus.Thiaroye, un nom qui résonne comme une blessure dans le cœur de beaucoup d’africains du continent et de la diaspora. Thiaroye, un fait historique et un thème artistique. Mis en vers par Senghor hier, déclamé par les rappeurs dakarois aujourd’hui, filmé par Ousmane Sembène et Tierno Faty Sow, exhalé et exalté par de nombreux artistes. Thiaroye demeure comme un des symboles les plus abjectes du colonialisme.
Travaillant depuis plusieurs années dans le cadre d’un doctorat en anthropologie sur les représentations collectives de ce massacre, je me suis intéressé ici aux parcours de ces anciens combattants. Plus que leurs exploits sur les champs de batailles ou leurs grades, j’ai retenu les souvenirs au quotidien de la vie de soldat de ces témoins et acteurs de la grande histoire. Douga Coulibaly au regard triste qui aurait pu se marier avec une Française si sa mère n’avait pas refusé, Amadou Maïa qui le sourire espiègle me racontait avoir botté les fesses de son supérieur raciste ou encore Omar Sall, le seul de ces hommes à avoir été présent à Thiaroye ce 1er décembre et dont les enfants hésitaient à dix ans près sur sa réelle date de naissance.
Ces photos, prises à la maison des anciens combattants de Bamako et Dakar, mais aussi à Matam, dans l’ouest du Sénégal, en 2008 se veulent un hommage aux martyrs de Thiaroye mais aussi plus largement aux tirailleurs sénégalais, qui provenaient de fait de toute l’Afrique subsaharienne francophone et qui combattirent pour une nation aujourd’hui bien peu reconnaissante à leurs égards.
Martin Mourre
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